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Faire valoir son diplôme et en obtenir l’équivalent...

Monsieur B. a effectué une partie de ses études en France, où il a décroché un master. Il avait pu s’inscrire à ce programme à la faveur d’une VAE (valorisation des acquis de l’expérience) par les autorités académiques françaises, qui avaient permis la contraction de la formation sur une année plutôt que deux (formation de 120 crédits ECTS).

Revenu en Belgique pour faire valoir son diplôme et en obtenir l’équivalent au diplôme correspondant en Fédération Wallonie-Bruxelles, Monsieur B. déchante. Il n’obtient qu’une équivalence de niveau (grade générique de master), plutôt qu’une équivalence complète. Il ne s’y attendait pas : plusieurs titulaires du même diplôme obtenu après la même formation dans la même université française, avec la même contraction grâce à la VAE, ont, eux, obtenu l’équivalence complète.

La Fédération Wallonie-Bruxelles se justifie : certes, il y a ces précédentes décisions, mais elles ont été prises à la suite d’erreurs - excusables - d’appréciation par l'administration, qui entachent ces décisions d’illégalité, de sorte que M. B. ne peut s’en prévaloir. Il ne peut en effet y avoir d’égalité dans l’illégalité. Monsieur B. entreprend néanmoins l’annulation de cette décision d’équivalence devant le Conseil d’Etat. Et l’obtient, quelque deux ans plus tard… En effet, le Conseil d’Etat considère que l’illégalité invoquée par la Fédération n’est nullement établie et décide « qu’en refusant d’accorder [à M. B.] une équivalence complète alors qu’elle l’a accordée à Messieurs [A. et C], qui se trouvaient dans une situation identique à celle de [M. B.], la [Fédération Wallonie-Bruxelles] a violé les articles 10 et 11 de la Constitution ».

Deux mois après cet arrêt, la Fédération Wallonie-Bruxelles, reprend une décision… identique à la précédente.

Dans le délai de 60 jours pour ce faire, M. B. se tourne à nouveau vers le Conseil d’Etat, qui n’a cependant pas l’occasion de décider l’annulation : après reddition du rapport de l’auditorat, qui soulève un moyen d’annulation d’office en la violation de la chose jugée, la Fédération procède au retrait de sa deuxième décision, et le notifie au Conseil d’Etat. Celui-ci constate alors la caducité de la procédure, pour perte d’objet, dans un arrêt qui énonce cependant : « à la suite de l’autorité de chose jugée de l’arrêt d’annulation, la [FWB] était tenue d’opérer la réfection de son acte et de prendre une nouvelle décision dans le respect de la chose jugée ».

A cette date, trois ans se sont écoulés depuis la demande d’équivalence. Une nouvelle décision est à prendre.

Elle est prise un mois plus tard. Et elle est identique aux deux précédentes dans son dispositif (équivalence de niveau), quoique plus amplement motivée : la Fédération y évoque bien sûr les arrêts du Conseil d’Etat, mais justifie plus explicitement l’erreur commise dans les précédents dossiers et les lacunes de la formation suivie par M. B., qui interdit, à ses yeux, qu’une équivalence complète puisse être accordée. Las de procédures longues et coûteuses, M. B. n’entreprend plus, cette fois, l’annulation de cette décision dans le délai imparti. Neuf mois plus tard, M. B. s’adresse cependant au Médiateur.

La décision querellée est certes devenue définitive, mais le Médiateur observe que l’autorité de chose jugée, qui est d’ordre public, n’a pas été respectée. Il le fait donc valoir auprès du Ministère. Celui-ci n’acquiesce pas directement : il communique l’avis de son Centre d’expertise juridique, à nouveau consulté, qui consiste à rappeler l’adage selon lequel « il ne peut y avoir d’égalité dans l’illégalité ».

Quelques mois plus tard, le Médiateur saisit l’occasion de la production, par M. B., d’un arrêt du Conseil d’Etat dans un cas très similaire, qui, non seulement annule la décision d’équivalence de niveau, mais impose au Ministère de délivrer une équivalence complète (le demandeur ayant dans ce cas actionné l’article 35/1 des LCCE1 ).

Le Médiateur invoque non seulement cette nouvelle décision, qui conforterait le caractère discriminatoire de l’équivalence de niveau prise pour M.B., mais renouvelle son argumentation sur l’autorité de chose jugée. C’est sur cette dernière base que le Ministère finit par accepter de retirer la décision d’équivalence de niveau et d’adopter en faveur de M. B. une équivalence au grade académique de master spécifique correspondant.

Cinq ans, environ, après la demande d’équivalence, tout est bien qui finit bien pour Monsieur B. : il est désormais titulaire du titre requis pour dispenser son enseignement, dont il est, par ailleurs, un expert reconnu… par la Fédération Wallonie-Bruxelles…

Attention : chaque cas évoqué ne peut pas nécessairement être généralisé à d’autres situations. En effet, quand il traite une réclamation, le Médiateur examine la situation concrète et prend en compte les arguments invoqués et les pièces probantes apportées.